DEVANT - Contrechamp de la rétention

une série et un long-métrage d’Annick Redolfi

Bienvenue sur la page de DEVANT - CONTRECHAMP DE LATENTION de Annick Redolfi

Cette page est un lieu documentaire où de nombreux contenus seront postés, en préparation d’un film de cinéma et d’une série pour les réaux sociaux sur l’accueil des visiteurs au CRA de Vincennes.

Une cabane en bois déglinguée, flanquée d’une simple planche clouée en guise de siège, deux bancs en bois sur les côtés : voici l’accueil du centre de rétention de Vincennes, perdu au fond du bois du même nom.

C’est ici même que se déroule le film, face à l’entrée du centre que nous n’avons pas l’autorisation de filmer. DEVANT observe et questionne la rétention et ses effets à travers le regard des visiteurs qui rendent visite aux détenus. Ce lieu d’attente, d’angoisse est aussi un lieu de prise de conscience politique face à l’absurdité d’un système transformé en machine à expulser des êtres humains jugés indésirables.

Appel à soutien

en partenariat avec proarti

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En soutenant le projet documentaire CONTRECHAMP DE LATENTION qui témoigne de cette zone de non-droit appelée Centre de rétention administrative (CRA), vous nous aidez à finir le projet et vous permettez sa diffusion à venir. Vous contribuez ainsi à faire connaître cette réalité, à sensibiliser les spectateurs à questionner notre politique d’accueil et son application au quotidien.

➞ Un film de long-métrage à destination du cinéma : DEVANT, afin d’informer les spectateurs sur la réalité de notre accueil ce témoignage sensible et une arme pour faire changer les politiques menées en France et en Europe,

➞ Une série : CONTRECHAMP DE LATENTION, jour après jour, des rencontre avec les visiteurs de ceux qui sont enfermés, à destination des jeunes générations pour une diffusion au plus près d’eux, sur les réseaux sociaux.

Un CRA c’est quoi ?

UN CRA C’EST QUOI ?

Un centre de rétention administrative (CRA) est un lieu où l’Etat français enferme les personnes étrangères sans titre de séjour en règle afin de les expulser vers leur pays d’origine. Les personnes enfermées n’ont commis ni crime ni délit mais sont pourtant privées de liberté sous le prétexte qu’elles risqueraient de ne pas se conformer à l’obligation de quitter le territoire français (OQTF). « En principe, le droit prévoit que l’enfermement d’un étranger pour mettre en œuvre son éloignement doit être strictement nécessaire, c’est-à-dire dans les cas où l’administration n’a pas d’autres moyens moins attentatoires aux libertés pour réaliser l’expulsion. Pourtant ce sont des milliers de personnes qui sont enfermées chaque année dans ces lieux en France », comme le souligne le rapport annuel 2022 des associations de défense des droits des étrangers dans les CRA.

Créé en 1981, le régime de la rétention s’inscrit dans une longue histoire de suspicion vis-à-vis des étrangers. Le durcissement des lois sur l’immigration a été de pair avec l’aggravation des conditions dans lesquelles les étrangers sont "retenus" pour être "éloignés" de France.

La durée d’enfermement est ainsi passée de 7 jours en 1981 à 10 jours en 1993, puis 12 jours en 1998, 32 jours en 2003, 45 jours en 2011 pour atteindre 90 jours en 2019. Ce qui n’était censé être qu’un délai provisoire pour faciliter la tâche de l’administration est devenu un système de punition et de dissuasion. En effet, "l’accroissement de la durée d’enfermement ne se traduit pas en termes d’éloignements effectifs. (...) La grande majorité des éloignements sont réalisés durant les premiers jours de la rétention.” Les personnes enfermées peuvent ainsi être privées de liberté pendant 3 mois sans jamais être expulsées. Au bout de ce délai, l’administration est obligée de les relâcher, mais leur situation n’est pas réglée pour autant, elle s’en trouve même aggravée.

Ce système est indigne à plusieurs niveaux. D’abord dans son principe même : enfermer dans un lieu carcéral, sous surveillance policière, derrière des barbelés et des miradors, dans un lieu anxiogène, sans aucune activité, des personnes parfaitement innocentes. Et ce pendant des mois ! Ensuite parce que ces lieux sont volontairement invisibles, opaques, soustraits au regard citoyen, facilitant les violations des droits humains qui sont quotidiennes.

Un film sur la rétention

Filmer l’accueil des visiteurs sans jamais tourner l’objectif de la caméra vers le centre de rétention. Ce qui m’est apparu d’abord comme une contrainte est devenu la force du film : observer la rétention en plan très large, englobant le lieu d’enfermement et tous ceux qui sont pris dans son champ de gravité, les visiteurs des retenus et au-delà, la société française dans son ensemble. L’accueil des visiteurs est un lieu frontière, entre intérieur et extérieur. C’est là que se joue tous les jours le même théâtre de l’absurde : celui de l’enfermement de personnes étrangères qui n’ont commis ni crime ni délit, mais qui n’ont « pas de papiers ». Dans cet espace, nos personnages sont nos fenêtres sur l’intérieur interdit, les passeurs du vécu d’un enfermement qui est aussi le leur car il s’inscrit dans leur histoire intime. Ils sont des révélateurs, montrant comment notre société assigne l’Étranger au rôle d’indésirable. Comment la France n’est pas le pays des Droits de l’Homme qu’elle prétend incarner.

Derrière ces parcours de la rétention, le film dépeint une réalité française que nous ne voulons pas voir. Il questionne un système institutionnalisé de criminalisation de l’étranger qui se durcit au fil des lois sur l’immigration. Un système absurde car il est aussi inefficace et coûteux, qu’inhumain et indéfendable. L’invisibilité de la rétention dans la société, la banalisation de la figure du « sans-papiers » sont autant de symptômes d’un glissement idéologique dangereux, d’une vision politique pernicieuse de notre avenir qui efface le sens des mots « hospitalité » et « humanité ». Il ne se passe pas une rencontre avec les visiteurs du centre de rétention de Vincennes sans que l’on me demande : « Où est la France, pays des droits de l’homme ? » Je n’ai toujours pas la réponse.

Les violations des droits sont quotidiennes. Non respect des procédures ou des conditions de rétention. Par exemple, de nombreuses personnes souffrent de pathologies non conciliables avec l’enfermement en CRA mais l’institution ferme les yeux. La violence, qu’elle soit le fait de policiers ou des retenus entre eux, est omniprésente : vols, agressions, bagarres, intimidations, passages à tabac, isolement, racisme, humiliation… mais aussi les tentatives de suicide, la camisole chimique, les méthodes d’expulsion forcées. Comme en 2014, quand Abdelhak Goradia, un Algérien âgé de 51 ans, est mort étouffé par son vomi, la tête enserrée d’un casque de boxe en mousse, dans le fourgon qui l’emmenait du centre de rétention de Vincennes à l’aéroport. Comme en mai dernier, toujours à Vincennes, la mort de Mohammed, un Egyptien de 59 ans, quelques heures après avoir été tabassé par la police en cellule d’isolement.

Pourquoi faire ce film ?

Il est des injustices qui nous insupportent plus que d’autres. Celle que vivent les personnes dites « sans papiers » en France m’interpelle depuis que je suis arrivée à Paris. En 1996 un collectif de « sans papiers » occupe l’église Saint Bernard, tout proche de mon domicile. L’épisode médiatisé donne alors un coup de projecteur sur la réalité de ces femmes et ces hommes immigrés à qui l’administration refuse de délivrer un titre de séjour, alors qu’ils travaillent, ont des enfants nés sur le sol français, participent à la vie sociale et économique. Depuis, le mot est entré dans le langage courant et colle à la peau d’êtres humains, les privant en 3 syllabes de leur humanité. Comme si on pouvait être « sans papiers » par essence. Ça rend la tâche de déshumanisation plus facile pour l’administration et les politiques discriminatoires envers les étrangers. Nous voilà bientôt 30 ans plus tard. Les choses ont affreusement empiré. Ce qui nous paraissait alors totalement inconcevable est devenu tout à fait légal, comme le délit de solidarité. Comme enfermer en prison pendant plusieurs mois des personnes qui n’ont commis ni crime ni délit.

Un jour, j’ai entendu à la radio que des « sans papiers » avaient mis le feu au centre de rétention de Vincennes. C’était en 2008. Cela se passait tout près de chez moi encore une fois. J’ai décidé de rendre compte de ce qui se passait dans ces lieux invisibles. Je me suis rapprochée des citoyens engagés qui ont créé l’Observatoire du Centre de Rétention de Vincennes. J’ai fait des visites aux retenus pour rendre compte des parcours des personnes enfermées et de ce qui se passe dans les centres de rétention. J’ai demandé l’autorisation de filmer à l’intérieur du centre de rétention de Vincennes. Elle m’a été refusée, à plusieurs reprises. En cherchant la forme que pourrait prendre ce film et en passant de nombreuses heures d’attente à discuter avec les autres visiteurs, le dispositif filmique s’est imposé. C’est là, sur cette scène inattendue constituée d’une cabane en bois et de deux bancs que le réel se racontait à moi.

Annick Redolfi

Contrechamp de la rétention

La série documentaire

À l’accueil des visiteurs, devant le centre de rétention de Vincennes, les proches des retenus nous racontent la réalité de la rétention.

  • Introduction. Première Vidéo DEVANT

Avec le concours de